Tout au long du mois d’août 2019, Carole Ghosn et les avocats de son mari ont multiplié les explications et porté des appels à la mobilisation pour montrer que les droits fondamentaux de Carlos Ghosn ne sont pas respectés et que tous les moyens sont mis en œuvre, par les procureurs japonais, pour maintenir la pression sur Carlos Ghosn.
Dans le New York Times, François Zimeray explique comment, peu à peu, les procureurs japonais allongent la liste d’interdictions imposées à Carlos Ghosn : interdiction de quitter Tokyo, interdiction totale de communiquer avec sa femme, interdiction de se connecter à Internet en dehors du bureau de ses avocats, interdiction de voir des personnes sans en informer les juges etc.
Le détournement de la nouvelle loi japonaise du plaider-coupable afin d’offrir des immunités en échange d’une collaboration avec les procureurs
Le nouveau système de plaider-coupable a été mis en place, en juin 2018, au Japon. Soit 4 mois seulement avant l’arrestation de Carlos Ghosn.
Le site International Law Office relate que l’affaire Carlos Ghosn est la deuxième seulement pour laquelle les procureurs ont proposé des accords de plaider-coupable en échange d’immunité à des individus , en échange de preuves et témoignages à charge contre l’accusé, ici Carlos Ghosn.
Les procureurs ont toujours refusé de partager avec l’équipe de défense de Carlos Ghosn l’identité des individus qui ont bénéficié de ces accords ainsi que les dépositions de ces derniers. En effet, les procureurs qui prendront en compte ces dépositions dans le cadre de l’enquête, ne prendront jamais la peine de confronter leurs versions avec celle de Carlos Ghosn, ni même de lui révéler, ainsi qu’à ses avocats, le contenu des accusations portées contre lui.
Une attitude de défiance que l’on observera également pour communiquer sur les éléments et correspondances obtenues illégalement lors de saisies non autorisées.
Interdiction de parler avec sa femme Carole
En complément et publiquement dans les comptes-rendus d’audience, les procureurs motivent aussi l’interdiction aux deux époux Ghosn de communiquer. Selon les procureurs nippons, Carole Ghosn se plaint, sans fondement, dans la presse, sur le sort réservé à son mari.
Selon eux, Carole Ghosn attire les médias internationaux et incite le monde entier à ouvrir les yeux sur le système de la justice de l’otage au Japon. ils écriront au juge : « Il n’y a pas moyen de la faire taire ».
Les prises de paroles de Carole Ghosn sont perçues par les procureurs japonais comme une menace qui justifie, en représailles, de continuer à lui interdire toute communication avec son mari depuis sa deuxième libération sous caution.
Rien de cela n’entame la détermination de Carole Ghosn, même après le 5ème refus du juge sur une autorisation de communiquer avec son mari Carlos, et après laquelle elle déclare :
“For the fifth time, the court ruled that I cannot see my husband or communicate with him in any way. It has now been 124 days since we last communicated, and our basic human rights continue to be violated. This cruel separation with no end in sight is further evidence of his persecution under Japan’s hostage justice system – it is a vicious retaliation designed to break him.I look forward to the day he is vindicated, and our family is reunited. Until then, this [decision] has only strengthened my commitment to strive for a fair trial and, ultimately, his freedom.”
Carole Ghosn
Les ONG internationales s’étonnent également de ce traitement imposé aux Ghosn. Ainsi, le directeur exécutif de Human Rights Watch, Kenneth Roth alerte sur Twitter :
Une date de procès repoussée sans cesse
De plus, contrairement à ce que l’on connait dans les systèmes juridiques occidentaux, Carlos Ghosn n’aura jamais eu accès à l’intégralité de son dossier. Avec ses avocats, ça n’est qu’au fil des audiences mensuelles en préparation du procès (pre-trial hearings), qu’il découvre quels éléments les procureurs ont collecté et souhaitent verser au dossier. Sans jamais y avoir préalablement accès donc.
Par ailleurs, aucune date de procès n’a jamais été fixée pour juger, sur le fond, cette affaire.
C’est sur ce motif que Carole Ghosn va, en marge du G7, interpeller le président de la République française Emmanuel Macron dans une déclaration et une démarche qu’elle explique à CNN.
Dans la lignée de cette mobilisation de Carole Ghosn auprès des chefs d’états en marge du G7, l’avocat français François Zimeray nous éclaire sur la violation des droits de l’homme dont est victime Carlos Ghosn. Selon lui, c’est un cas révélateur du système de la justice de l’otage japonais.
Dans une tribune publiée dans le JDD, François Zimeray évoque ainsi que « cet acharnement d’exception [des procureurs] compromet la possibilité d’un procès équitable ».