Vous trouverez dans cette rubrique les dernières actualités et mises à jour juridiques concernant les procédures impliquant Carlos Ghosn.
Point sur les procédures japonaises
Trois procédures distinctes comprenant quatre inculpations visent désormais Carlos Ghosn au Japon :
- Deux inculpations liées a deux périodes distinctes de non-déclaration de revenus futurs aux autorités Japonaises des marchés financiers.
- Abus de confiance aggravé pour la supposée couverture par Nissan de pertes sur des investissements personnels, et le détournement présumé de fonds via l’Arabie Saoudite a des fins personnelles
- Abus de confiance aggravé pour détournement présumé de fonds via Oman à des fins personnelles
Quelles sont donc les allégations qui ont valu à Carlos Ghosn plusieurs arrestations spectaculaires, suivie d’une longue privation de liberté ? Au moment de sa première arrestation, un seul grief fut formulé contre Monsieur Ghosn. Les autres accusations et enquêtes sont venues ultérieurement pour justifier après-coup un postulat de la culpabilité déjà posé d’emblée, dont il a fallu ensuite à tout prix chercher le motif.
1/ La prétendue non-déclaration de revenus futurs aux autorités japonaises des marchés financiers
Il s’agit là de deux accusations séparées, pour le même motif, mais pour des périodes distinctes, ayant pour seul but de prolonger la détention de Carlos Ghosn.
Pour le bureau des procureurs japonais, Carlos Ghosn aurait omis de déclarer 9 139 000 000 Yens (approximativement 73 millions d’euros) de revenus futurs sur les périodes de 2011 à 2015 et 2016 à 2018.
Or, les revenus incriminés n’ont pas été perçus et ne peuvent en aucun cas alimenter un quelconque soupçon de fraude fiscale ou de violation de la loi sur les marchés financiers en matière d’obligation de déclaration de revenus potentiels. Les revenus visés par cette procédure ne concernent que des revenus et compensations hypothétiques, liés à des droits à la retraite et à une clause de non-concurrence, un point sur lequel M. Ghosn n’avait pas encore pris de décision.
Le caractère injustifié de ces accusations est évident. En tout état de cause, nul besoin de placer et maintenir une personne en détention durant des mois pour enquêter sur cette situation, parfaitement connue du parquet japonais puisqu’elle avait déjà fait l’objet de discussions avec les autorités dix années auparavant.
2/ L’accusation d’abus de confiance aggravé pour la supposée couverture par Nissan de pertes sur des investissements personnels, et le détournement présumé de fonds via l’Arabie Saoudite à des fins personnelles
Le ministère public japonais soupçonne Carlos Ghosn d’avoir fait supporter, à Nissan, la couverture de ses contrats d’échange de monnaie et d’avoir détourné à son profit une partie des redevances versées par Nissan à son concessionnaire en Arabie Saoudite Khaled Al-Juffali (pour 13 millions d’euros versés entre 2009 et 2012).
En réalité ces versements étaient parfaitement réguliers et les allégations reposent sur de simples constructions artificielles.
Khaled Al-Juffali a toujours été un partenaire de longue date de Nissan, dans la région, notamment face à la concurrence de Toyota. Tout comme son soutien à des entreprises mondiales telles que IBM, Siemens ou Mercedes-Benz pour développer leurs activités en Arabie Saoudite, M. Juffali avait établi avec Nissan une joint-venture égalitaire, dénommée Nissan Gulf FZCO, couvrant une partie du Moyen Orient (Koweit, Abu Dhabi, Bahrain et Arabie Saoudite) qui a promu les activités commerciales de Nissan a partir d’octobre 2008, soit au lendemain de la crise financière de septembre 2008.
A partir de février 2009, la promotion des activités de Nissan en Arabie Saoudite a été transférée de Nissan Gulf à Khaled Juffali Company dont l’entremise précieuse a permis de multiplier les ventes et de remplacer l’ancien agent de Nissan par une présence directe de Nissan en Arabie Saoudite. Cette présence est matérialisée dans le cadre d’une nouvelle joint-venture en 2013, non égalitaire cette fois, dans laquelle Nissan détient 75%, après avoir obtenu une licence particulièrement difficile à obtenir des autorités saoudiennes permettant la détention par un groupe étranger d’une majorité dans une société saoudienne.
Tous les paiements faits par Nissan à Juffali, de 2009 à 2012, étaient recommandés et approuvés par les dirigeants de Nissan, tant au niveau régional que celui de la maison mère, par les équipes commerciales, financières, membres des comités exécutifs ainsi que ceux de la direction générale.
Parler dans ce cadre de paiement non-justifié à Khaled Juffali, d’un coté pour profiter à Carlos Ghosn, et de l’autre côté pour le remboursement d’une caution que M. Juffali a porté à M. Ghosn lors de la crise financière de 2008, n’a pas de sens étant donné que la caution n’a jamais été appelée. Sans dette, il n’existe aucune cause à un quelconque remboursement. Cette accusation établit une relation hypothétique entre plusieurs éléments n’ayant pas de rapports entre eux. C’est une pure spéculation qu’aucune preuve n’est venu étayer. Là encore, nul besoin d’une longue et cruelle mise à l’écart de Carlos Ghosn pour procéder aux vérifications voulues.
3/ L’accusation d’abus de confiance aggravé pour détournement présumé de fonds via Oman à des fins personnelles
Les primes incitatives versées visaient à récompenser les intermédiaires les plus performants de Nissan, dans le monde. Il s’agit d’une pratique régulière et légale. Suhail Bahwan Automobile (SBA) a été l’un des concessionnaires les plus performants au monde, générant 6.5 milliards de dollars de chiffre d’affaires pour Nissan pour la période de 2011 à 2018, soit une moyenne de 810 millions de dollars approximativement par an.
Les primes versées aux intermédiaires sont de la responsabilité des directeurs de région et les montants sont approuvés par la chaine de commandement de Nissan. Il faut noter qu’à partir de 2017, M. Ghosn n’est plus Directeur général de Nissan, ayant laissé ce siège à M. Saikawa qui a maintenu le régime de primes incitatives aux intermédiaires les plus performants, dont SBA. De plus, au regard des performances de SBA les primes versées étaient inférieures à celles perçues par des courtiers américains ou européens pour un rendement similaire.
Point sur les enquêtes en France
Suite à l’audit mené par le cabinet Mazars, missionné par Renault et Nissan pour explorer les comptes de leur filiale commune RNBV, plusieurs signalements ont été effectués à la justice, déclenchant une enquête préliminaire du parquet de Nanterre. Il est important de rappeler que Carlos Ghosn ne fait aucunement l’objet de poursuites en France.
1/ L’anniversaire de l’Alliance Renault-Nissan à Versailles
Contrairement à ce qui a été affirmé par des personnes qui n’y participèrent pas, il s’agissait bien d’un évènement « corporate » et en aucun cas d’une fête privée.
La soirée du 9 mars 2014 a fait l’objet d’un carton d’invitation officiel des deux sociétés Renault et Nissan. La qualité des invités officiels, dont Chérie Blair, administrateur de Renault, le fils du fondateur de Nissan, comme le discours prononcé sur l’Alliance, laissent peu de doutes sur le caractère éminemment professionnel de la célébration. Il se trouve que la date était également celle de l’anniversaire de M. Ghosn, mais la véritable soirée d’anniversaire privée de M. Ghosn eut en réalité lieu le lendemain, 10 mars 2014, dans un restaurant parisien. Elle fit l’objet d’un carton d’invitation, à caractère personnel, auprès de personnes faisant partie du cercle familial et amical restreint de M. Ghosn. Cet évènement privé a fait, bien entendu, l’objet d’un règlement par Carlos Ghosn.
2/ La mise à disposition gracieuse du Château de Versailles pour la cérémonie de mariage de Carlos Ghosn
Carlos Ghosn n’a jamais demandé la mise à disposition gracieuse des lieux pour cette occasion privée. Cet évènement a été entièrement réglé sur fonds privés sur la base d’une facture comportant l’ensemble des prestations (traiteur, musique, fleurs etc…) présentée par la société en charge de l’organisation de cet évènement sur lesquelles il est indiqué que la salle de réception est « offerte ». Carlos Ghosn a découvert dans la presse, plus de 2 ans après la date de l’évènement, que cette mise à disposition gracieuse aurait en fait été imputée sur Renault, vraisemblablement dû à une mauvaise interprétation des organisateurs. Elle n’a rien coûté à Renault, pas plus qu’au Domaine du Château de Versailles et, dès qu’ils ont eu connaissance de cette imputation erronée, les époux Ghosn ont offert de régulariser une situation qu’ils n’ont nullement créée.
3/ Les prétendues irrégularités révélées par l’audit commandité par RNBV
Le 4 juin 2019, Renault a annoncé avoir identifié que Carlos Ghosn avait engagé 11 millions d’euros de « dépenses suspectes » depuis 2012. La somme évoquée recouvrirait des « surcoûts de déplacement de M. Ghosn par avion », « certaines dépenses engagées par Carlos Ghosn » ainsi que « des dons ayant bénéficié à des organismes à but non lucratif » détaille le communiqué de Renault. Il va de soi que M. Ghosn souhaite pouvoir répondre point par point à ces accusations et les réfuter.
Or, depuis plusieurs mois, des éléments de cet « audit » ont circulé dans les médias sans que M. Ghosn ou ses avocats, qui en ont découvert l’existence par voie de presse, n’en aient été destinataires.